Immigration : non, Emmanuel Macron ne fait pas diversion

Il est de bon ton, dans les médias et même parmi mes amis politiques, de considérer que le débat sur l’immigration voulu par le Président de la République est une manœuvre électoraliste pour draguer les électeurs d’extrême-droite, voire une tentative de diversion pour masquer sa politique anti-sociale.

C’est là une erreur d’analyse majeure car elle démontre que leurs auteurs méconnaissent la réalité du mouvement de fond à l’œuvre dans ce pays : le repli identitaire et l’autoritarisme ne sont plus l’apanage de l’extrême-droite et cela ne date pas d’aujourd’hui. De plus, elle laisse penser qu’au fond Emmanuel Macron serait un humaniste et que sa politique serait un peu affermie par simple stratégie. C’est là lui offrir une virginité qu’il ne mérite pas. C’est minimiser la gravité de la politique migratoire à l’œuvre. C’est le dédouaner de ce que vivent les étrangers en France.

Huit lois concernant l’immigration ont été votées depuis 2003. Par tous les gouvernements. Peut-on sérieusement penser que Sarkozy, Hortefeux, Guéant, Hollande, Valls, Macron et consorts n’ont fait cela que par stratégie électorale ?

Peut-on réduire à de la tactique le fait que la police française opère de véritables chasses à l’homme dans les Alpes ? Que nous ayons rétabli les frontières intérieures en Italie et en Espagne ? Que nous y pratiquions sans vergogne des contrôles au faciès ? Que la France refoule des mineurs en Italie ? Que l’Union Européenne ait mis fin à toutes les opérations de sauvetage en Méditerranée ? Que les ONG ait été empêchées de sauver des vies, insultées par Christophe Castaner ? Que le budget de Frontex ait été porté à 1,6 milliard par an ? Qu’aucune solution d’hébergement ne soit proposée aux exilés qui dorment dans la rue ? Que les demandeurs d’asile n’ait pas le droit de travailler ni de s’intégrer ? Que la politique d’enfermement des migrants soit encore et toujours durcie ?

Doit-on réellement poursuivre cette longue litanie des actes anti-étrangers mis en œuvre par le gouvernement et ses prédécesseurs ?

Faut-il y ajouter les petites phrases, maintes fois rabâchés à dessein depuis des années pour incruster dans la tête des citoyens le rejet de l’étranger ?

En prenant un minimum de recul, qui peut encore voir dans ces actes répétés une simple « triangulation » électorale ?

A la fin des années trente, la droite comme la gauche avaient, elles aussi, intériorisé ce tropisme nationaliste. Peut-on sérieusement affirmer aujourd’hui que ce n’était que stratégie et qu’il n’y avait pas alors une lame antisémite dans le pays ?

Non Emmanuel Macron ne fait pas diversion. Il applique un repli identitaire que quantité de citoyens, d’associations et d’ONG combattent quotidiennement avec un courage et une humanité admirables. Plutôt qu’entrer stérilement dans le petit jeu du buzz médiatique, nous serions bien inspirés de travailler au fond et de nous tenir au côté de ceux qui luttent.

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