Gentil avec les gentils

Lettre aux ministres Gérald Darmanin et Olivier Dussopt

A l’attention de :
Monsieur Gérald Darmanin, Ministre de l’Intérieur et des Outre-mer.
Monsieur Olivier Dussopt, Ministre du Travail, du Plein emploi et de l’Insertion.

Monsieur le Ministre,

C’est avec une grande attention que j’ai lu l’interview que vous avez accordée au journal Le Monde ce mercredi 2 novembre 2022, conjointement avec Monsieur Olivier Dussopt, à propos de la loi immigration que vous projetez de présenter au Parlement dans les tout prochains mois.

Par la présente, je ne viens pas à vous pour en faire l’exégèse mais sur un point particulier et très concret, qui concerne directement la commune dont je suis l’Adjoint au Maire aux Solidarités : Alfortville (Val-de-Marne).

Comme vous le savez peut-être, des travailleurs sans-papiers de l’agence Chronopost y sont en grève et en lutte depuis onze mois et vivent nuit et jour devant les locaux de l’agence pour obtenir un droit au travail, sans aucune réponse de l’État, ni même de dialogue ouvert. Pourtant, ils y travaillent durement, dans des conditions que nos concitoyens ne tolèreraient d’aucune manière, avec des horaires inacceptables, une précarité indigne et une dureté physique qui démontre leur courage.

Ils sont soutenus par beaucoup d’élus nationaux et locaux, mais surtout par quantité de citoyens, qui leur apportent  nourriture, aide matérielle et financière, et bien sûr soutien moral.

Dans l’interview de ce jour, je lis dans votre bouche que « la clé de la réussite de l’immigration, c’est l’intégration, par la langue, les valeurs françaises, le travail. ». Parce que je les fréquente au quotidien, je puis vous assurer que ces hommes jeunes et travailleurs entrent très exactement dans cette description. Francophones pour la plupart, prenant des cours de français pour les autres, respectueux de nos valeurs et travailleurs acharnés, ils n’aspirent qu’à une chose : être intégrés à notre communauté nationale.

Plus loin dans l’interview, vous affirmez –et je ne peux que vous approuver : « Et puis, il y a d’autres personnes, présentes sur le territoire depuis des années, qui travaillent. Aujourd’hui, dans le cadre de ce qu’on appelle la circulaire Valls, ces personnes peuvent être régularisées à condition de prouver leur ancienneté sur le territoire et la réalité de leur activité professionnelle. Nous souhaitons, tout particulièrement dans les métiers en tension comme ceux du bâtiment, que le travailleur immigré en situation irrégulière puisse solliciter la possibilité de rester sur le territoire sans passer par l’employeur. Cela permettra d’inverser le rapport de force avec quelques employeurs qui peuvent trouver un intérêt à ce que leurs salariés soient dans une situation d’illégalité. »

Les travailleurs Chronopost sont exactement dans cette situation : 1) ils travaillent depuis des années, employés par des dirigeants peu scrupuleux (Derichebourg en qualité de sous-traitant) qui profitent de leur statut, mais se font renvoyer par la Préfecture du Val-de-Marne à l’obligation de produire des « cerfas », documents que leur employeur leur refuse ; 2) Ils sont compétents et expérimentés ; 3) notre pays a besoin de leurs bras pour répondre à la demande croissante en matière logistique.

Monsieur le Ministre, parce que je vous ai lu, je comprends que votre état d’esprit est à la régularisation des situations telles que celle que je viens de vous décrire dans ma ville. Vous et moi savons qu’il n’est ni possible ni raisonnable de laisser perdurer un tel imbroglio administratif, quand le besoin de travailleurs est là et que la volonté de ces derniers est l’intégration la plus parfaite.

Parce que vous dites vouloir être « méchant avec les méchants et gentil avec les gentils », je vous demande, sans attendre une éventuelle loi immigration en 2023, de prendre en considération les « gentils » travailleurs de l’agence Chronopost d’Alfortville et de proposer à Madame la Préfète du Val-de-Marne d’ouvrir un dialogue ouvert avec eux et leurs représentants. Sachez que s’il faut une forme de médiation entre les travailleurs Chronopost d’Alfortville et la Préfecture, je suis prêt, en qualité d’élu local, à être celui-là. Nous sortirons alors tous d’un blocage absurde qui ne sert personne.

Je vous prie de croire, Monsieur le Ministre, en l’assurance de ma haute considération.

Étienne FILLOL,
Adjoint au Maire d’Alfortville #Solidarités #ESS
Conseiller Territorial Grand Paris Sud Est Avenir.

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